Filature #4

Elle ouvrit un œil et constata avec bonheur que le soleil baignait sa chambre de lumière. Elle sourit. C’était comme si sa chaleur l’irradiait tout entière. Elle s’étira, se retourna et sauta du lit, ravie de commencer cette journée.
« Il va venir » se dit-elle. Elle s’habilla vite, se regarda dans le miroir, natta ses cheveux, s’assura une dernière fois qu’elle était belle.
« Je ne veux pas le décevoir. Je le vois si rarement. ».
Elle quitta sa chambre, arriva dans la cuisine, salua sa mère et s’assit pour prendre son petit déjeuner.
– Il vient bien à 9h ? s’enquit-elle en engloutissant ses Chocapic.
– C’est ce qu’il a dit. Tu es prête ?
– Oui.
Elle s’arrêta net. L’espace d’un instant, son estomac se noua. Ne pas y penser. Il viendra. C’est sûr.
Elle se dirigea vers sa chambre, saisit un livre et s’assit. Attendre le bruit de la sonnette était le pire moment. C’est là, plongée dans sa lecture, qu’elle l’entendit.
« Il est là ! » hurla-t-elle en se levant, courant vers la porte. Il avait certes quarante-cinq minutes de retard sur l’horaire convenu, mais il était là. Elle saisit son sac et dévala les escaliers.
– Papa !
Il la serra dans ses bras et recula d’un pas pour mieux l’observer.
– Que tu as grandi ! Encore un peu je ne t’aurais pas reconnue !
Elle prit la pause, tellement heureuse qu’ils furent à nouveau ensemble.
– C’est normal Papa, j’ai neuf ans, hein ?
Il la serra dans ses bras une nouvelle fois puis lui demanda :
– Où veux-tu aller ? Tu es toujours fan de la bibliothèque ?
– Oui ! hurla-t-elle.
– Alors en route. C’est parti.
Ils marchèrent jusqu’à la voiture.
Sur le chemin, ils parlèrent de tout et de rien, sautant du coq à l’âne, avides qu’ils étaient de rattraper le temps perdu.
Le soleil tapait fort sur le pare-brise. Elle avait du mal à discerner les contours de son visage. Ah ! Cette manie de l’observer à la dérobée pour se souvenir de lui le soir, au moment du coucher, précisément quand elle aurait aimé qu’il fut là.
Son père gara la voiture et ils s’engouffrèrent dans la bibliothèque.
Une fois dans la section jeunesse, elle se dirigea vers les romans pour fille. Elle passa un long moment à regarder les couvertures, les images, à lire les résumés.
Elle choisit quatre ouvrages et s’en retourna à cloche-pied vers son père.
– J’ai fini ! lança-t-elle
– Voyons ce que tu as choisi…
Des romans sur la cour à Versailles ? Comme ceux que je t’ai offert pour ton anniversaire ?
– Oui, je les adore !
– Super. Si cela te fait plaisir, aux prochaines vacances, je t’emmènerai voir le château en vrai.
Elle le regarda, incrédule. Combien de fois lui avait-il fait de telles promesses ?
Elle décida qu’il valait mieux le croire et répondit d’un oui franc et net.
Elle était bien consciente qu’elle ne verrait peut-être jamais Versailles avec lui, mais à cet instant, cela lui importait peu.
– Tu veux bien me montrer un livre d’images sur le château ?
– Avec grand plaisir.
Il lui prit la main et ils partirent ensemble.


Une fiction écrite par Caroline, participante à l'atelier d'écriture à la manière de Sophie Calle #1 animé par Jérémy Bracone, suite à une filature dans la médiathèque Verlaine dimanche 20 mars.

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